« Une Pensée par Jour »
du Traité de l’Amour de Dieu
30 octobre
2010
« Il prévit bien aussi
que le premier homme abuserait de sa liberté, et quittant la grâce il
perdrait la gloire ; mais il ne voulut pas traiter si rigoureusement la
nature humaine comma il délibéra de traiter l’angélique.
C’était la nature humaine de laquelle il avait résolu de prendre une
pièce bienheureuse, pour l’unir à sa divinité. Il vit que c’était une
nature faible, un vent qui va et qui ne revient pas (Ps., LXXVII, 39),
c’est-à-dire qui se dissipe en allant. Il eut égard à la surprise que le
malin et pervers Satan avait faite au premier homme, et à la grandeur de
la tentation qui le ruina, Il vit que toute la race des hommes périssait
par la faute d’un seul ; si que par ces raisons il regarda bien notre
nature en pitié, et se résolut de la prendre à merci.
Mais afin que la douceur de sa miséricorde fût ornée de la beauté de sa
justice, il délibéra de sauver l’homme par voie de rédemption rigoureuse
; laquelle ne se pouvant bien faire que par son Fils, il établit
qu’icelui rachèterait les hommes, non seulement par une de ses actions
amoureuses qui eût été plus que très suffisante à racheter mille
millions de mondes, mais encore par toutes les innumérables actions
amoureuses et passions douloureuses qu’il ferait et souffrirait jusques
à la mort, et la mort de la croix à laquelle il le destina, voulant
qu’ainsi il se rendit compagnon de nos misères, pour nous rendre par
après compagnons de sa gloire, montrant en cette sorte les richesses de
sa bonté, par cette rédemption copieuse (Ps., CXXIX, 7), abondante,
surabondante, magnifique et excessive, laquelle nous a acquis et comme
reconquis toue les moyens nécessaires pour parvenir et arriver à la
gloire, de sorte que personne ne puisse jamais se plaindre, comme si la
miséricorde divine manquait à quelqu’un. » |